Blason Dauphiné BIBLIOTHÈQUE DAUPHINOISE Armoiries Hautes-Alpes
ACCUEIL LISTE DES OUVRAGES LISTE DES PERSONNES ACTUALITES CONTACT

M. Pierquin de Gembloux

Lettre à M. Gautier, conseiller de préfecture des Hautes-Alpes, sur les antiquités de Gap

Description de l'exemplaire  (Voir : Notes sur la description des ouvrages)

Grenoble, Imprimerie J.-L. Barnel, 1837
In-8° (211r x 125r mm), 32 pp.
lib_ouvrage : titre
Pour agrandir, cliquez sur la photo

Notes sur l'exemplaire

Broché sous couvertures modernes d'attente.

Notes sur l'ouvrage

Etude sur Gap où l'auteur, de conjectures en hypothèses, arrive à l'exposé de 9 propositions sur l'histoire antique de Gap et son étymologie toutes plus fantaisistes les unes que les autres, le tout derrière une apparence de grand logique et d'érudition.

Cette étude était destinée à Théodore Gautier, pour son histoire de la ville de Gap. Il reprend les conclusions de Pierquin dans ce passage du Précis de l'histoire de la ville de Gap., paru en 1844 (pp. 4-6). C'est aussi un bon résumé de l'ouvrage :

"Un savant, né dans ses murs et qui florissait dans la dernière moitié du XVIIe siècle, Raymond Juvenis, emprunte tour-à-tour la langue de Rome, d'Athènes et de Jérusalem pour se livrer à de profondes recherches sur l'étymologie de ce nom et sur la transformation qu'il a subie. Il parvient à démontrer que Vap en langue celtique, signifie un fond, une ouverture, un abîme et même une vallée grasse, ce qui convient singulièrement à la position de la ville et de son territoire; de plus, il ajoute qu'un savant médecin de cette même ville s'est étrangement fourvoyé lorsqu'il a soutenu que Gap n'est autre que la grande Cœsarée, parce que l'on trouve au quartier de Saint-Main une ferme qui porte le nom de Capadoce.

Voilà où en étaient nos savants sur l'origine, la situation et le nom de la ville de Gap, lorsque un numismate distingué, un profond linguiste vint naguère débrouiller le chaos de nos antiquités : M. Pierquin de Gembloux a pensé que le fils d'Esculape dont s'est moqué Juvenis n'était pas digne de risée autant que l'a supposé cet auteur; car, si la ville de Gap n'est pas la grande Cœsarée, elle avait du moins été civilisée par les Grecs venus de l'Asie-mineure ou de Rhodes, ou peut-être même par ces Tyriens, compagnons d'Hercule, qui vinrent châtier l'insolence d'Alpyon et de Brigion et les punir de leurs cruautés, quinze ou seize cents ans avant l'ère chrétienne. Gap, capitale de la république des Tricoriens, alors placardée au Mont-Kapados que vulgairement nous appelons Saint-Main, partagea le sort des huit cents villes qui tombèrent au pouvoir du gallicide César, bien qu'il n'ait pas daigné la mentionner dans ses commentaires.

M. Pierquin suit avec dextérité les transformations subies par son nom primitif, fait preuve d'une grande érudition en exposant son système, et croit avoir parfaitement démontré : 1° que la ville de Gap est de beaucoup antérieure à la première mention qu'en fait l'histoire; 2° qu'elle existait mille ans au moins avant Jésus-Christ; 3° qu'elle eut deux noms, l'un mystérieux et sacré, Tricorium; l'autre profane, Kapodunum; 4° qu'elle fut la capitale d'une république celtique, puis gallo-grecque, et enfin des Tricorii; 5° que ses armoiries étaient une lionne représentée sur la statuète par lui possédée et trouvée sur le Mont-Kapados; 6° que son nom de Kapodunum voulait dire sommet fortifié, ou bien sommet heureux et fortifié des Tricoriens; 7° qu'elle était située sur le Mont-Kapados qui, au VIe siècle, prit le nom de Saint-Main, Saint-Méhen, ou Saint-Mein; 8° enfin, qu'on y battait monnaie neuf cents ans au moins avant la venue du Messie.

Je me suis permis ailleurs de hasarder quelques observations sur les résultats qui viennent d'être exposés; elles tiennent plus à des faits contestables et à la connaissance des localités, qu'à celle de l'antiquité si familière à M. de Gembloux; mais ce n'est pas dans un abrégé tel que celui-ci que l'on peut suivre notre auteur dans la discussion des preuves qu'il apporte à l'appui de son système."

Rappelons que le nom antique de Gap n'a jamais été Kapodunum, mais Vappincum.

Théodore Gautier fait ensuite preuve de plus de réserve vis-à-vis de ces conclusions, dans le premier volume de l'Histoire de la ville de Gap et du Gapençais, IVe lettre. Etymologie – Origine de Gap., puisqu'il en donne une analyse très critique (pp. 67-69). Il finit par un résumé d'une légère ironie où, presque sous forme d'un petit conte, il rassemble toutes les étymologies proposées par les différents savants, dont Pierquin, dans un effort presque parodique de synthèse (p. 69).

Dès sa parution, Jules Ollivier, dans sa notice bibliographie parue dans la Revue du Dauphiné, tome II, pp. 256-257, se montrait très circonspect, malgré la modération du ton :
"Cette dissertation, remarquable par le parti que l'auteur a su tirer de la philologie pour éclaircir les obscurités archéologiques qui entourent le berceau de la cité dont il dévoile l'origine, peut offrir, il est vrai, quelques conclusions contestables, mais elle se distingue par la sagacité de la critique et une grande habileté d'interprétation. Là où les textes parlent clairement, la discussion doit se taire; mais lorsque les monumens historiques n'ont laissé que des traces effacées, alors s'ouvre pour l'érudition la carrière des conjectures, et c'est alors dans l'emploi de ces moyens pour arriver à la découverte de la vérité que la science est appelée à déployer toutes les ressources de l'analogie."

Ce qui est repris de façon plus explicite par Colomb de Batines dans son Annuaire bibliographique du Dauphiné pour 1837. (p. 40). "M. Jules Ollivier a consacré, dans la Revue du Dauphiné (tome II, pp. 256-257), quelques lignes à l'examen de cet opuscule, selon nous tout conjectural, et dont les conclusions sont, tout au moins, fort hasardées". Il annonce que ce texte a d'abord paru dans les nos des 29 et 31 août, 5, 7 et 9 septembre 1837 du Patriotes des Alpes.

Georges de Manteyer dans Le nom et les deux premières enceintes de Gap, (p. 188, n. 1) se moque gentiment de Pierquin de Gembloux : "Le plus bel hommage, qu'il soit possible de rendre à ce dernier auteur, est de reproduire le titre de son travail sans omettre une seule des qualités qui y suivent son nom".

Au verso du titre, liste des Etudes romanes sur le Delta celtique, par le même :
1re Étude.—Lettres à M. Matter sur les Antiquités de Grenoble.
2e. — Lettre à M. de Coston sur un Monument de Théologie arithmétique existant à Valbonnais.
3e. — De la Mythologie du département de l'Isère.
4e. — Des différents noms portés par la rivière Isère dans l'antiquité.
5e. — Inductions philologiques sur Quintus Curtius Rufus.
6e. — Lettre à M. Gautier sur les Antiquités de Gap.
7e. — Géographie du Delta celtique.
8e. — Sur l'état de l'Art dramatique chez les Allobroges.
9e. — Histoire littéraire du Delta celtique.
10e.— Lettres sur quelques erreurs commises dans l'explication de certains monuments paléographiques du Delta celtique.
11e.— Des traces laissées par le phénicien, le punique, le grec et l'arabe dans les dialectes néo-latins du Dauphiné.

Même si rien ne l'indique, il s'agit probablement plus de projets que d'ouvrages réellement parus. Seuls quelques uns d'entre eux semblent avoir été publiés. Au CCFr, on trouve :
Lettres à M. Matter, membre de l'institut, sur les antiquités de Grenoble, Grenoble : Baratier frères et fils , 1836, in-8°, 32 pp. (BNF : 8-LJ9-734)
Lettre sur un monument de théologie arithmétique, Grenoble : Baratier frères et fils , 1837, in-8°, 12 p. (BNF : 8-LJ20-440).
Lettre à M. Cournot, recteur de l'académie de Grenoble, sur les différents noms donnés à la rivière Isère, Bourges : impr. de G. Ménacé (sic), s. d., in-8°, 8 p. (BNF : Z-57682)

Cet ouvrage est l'œuvre du médecin polygraphe Claude-Charles Pierquin de Gembloux (Bruxelles 1798 - Paris 1863) : « Sa bibliographie, écrit un critique, forme à elle seule un magnifique poème où se mêlent, s'affrontent et se complètent l'histoire, l'archéologie, la numismatique, la philologie, la pédagogie, la médecine, l'hygiène, la poésie. » Membre d'une cinquantaine de sociétés savantes françaises et étrangères, il publie plus de 160 ouvrages sur les sujets les plus divers.

Références  (Voir : Liste des sources et références)

Sur Pierquin de Gembloux, voir la notice Wikipedia.

Revue du Dauphiné, II, pp. 256-257 : notice bibliographique par Jules Ollivier et p. 262.
BNF : 8-LJ9-892 (8 exemplaires au CCFr)