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Pierre Buffault
Inspecteur des eaux et forêts, Correspondant du ministère de l'Instruction publique, Lauréat de la Société nationale d'Agriculture de France.

Le Briançonnais forestier et pastoral.
Essai de monographie.

Description de l'exemplaire  (Voir : Notes sur la description des ouvrages)

Paris-Nancy, Berger-Levrault, Libraires-Éditeurs, 1913
In-8° (252 x 164 mm), 232 pp., 3 cartes et un schéma dans le texte, 11 planches hors texte avec 22 photographies en noir et blanc.
Le Briançonnais forestier et pastoral, Pierre Buffault : couverture Le Briançonnais forestier et pastoral, Pierre Buffault : titre
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Notes sur l'exemplaire

Broché. 
Provient de la bibliothèque du Docteur Taravellier, de Briançon (signature et tampon sur le titre)

Notes sur l'ouvrage

Il s'agit d'une étude documentée sur la situation forestière et pastorale du Briançonnais (y compris le Queyras), se concluant par des mesures de protection et de restauration des terrains de montagne, dans le cadre du développement économique de la région. L'ouvrage contient une description de la géographie physique et humaine de la région.

L'ouvrage contient :

Avant propos (pp. 5-7). Pierre Buffault situe ce travail sur le Briançonnais dans le cadre des actions visant à « développer le tourisme et les sports, mais aussi de contribuer au relèvement économique des pays de montagne et à leur restauration sylvo-pastorale ». Ayant passé deux ans au service des Eaux et Forêts de Briançon, il souhaite « en même temps faire partager à d'autres les sentiments d'admiration pour ses beautés naturelles, de sympathie pour ses qualités morales, d'intérêt pour sa situation économique, que le Briançonnais nous à laissés, durables et profonds, après un bref séjour » et contribuer à sa prospérité économique par l'étude des forêts et pâturages de la région et des préconisations d'amélioration qu'il promeut.

Première partie. Étude du Lieu (Situation, Physiographie) (pp. 9-85). Description géographique complète du Briançonnais, même s'il s'agit plus d'un travail de compilation et de synthèse, que d'une réflexion nouvelle sur les caractéristiques géographiques de cette région.

Deuxième partie. Étude de l'habitant (pp.87-126). Le détail de cette partie est le suivant : Démographie, Ethnogénie, Population, Groupement, Costume, Mode d'existence, Alimentation, Hygiène, maladies, Mentalité, caractère, Processivité, criminalité, Migrations, dépopulation, Mouvement touristique, Garnison. Elle est instructive en ce qu'elle restitue la vision sur la société briançonnaise que pouvait en avoir un fonctionnaire progressiste et acquis aux idées de l'époque sur le développement économique des montagnes et plus généralement de la société dans laquelle il vivait. Elle en dit probablement autant sur les habitants du Briançonnais que sur celui qui regarde et décrit (voir ci-dessous quelques extraits).

Troisième partie. Étude du travail. (pp . 127-149). Partie descriptive sur la propriété rurale, la répartition du territoire, les cultures, l'élevage, etc. Un court chapitre est consacré au commerce et à l'industrie.

Quatrième partie. Statistique sylvo-pastorale et situation actuelle (pp. 151-221). Consacrée à l'étude des forêts et pâturages du Briançonnais, cette partie est au cœur du sujet du livre. Après une partie descriptive, Pierre Buffault se penche sur les deux thèmes au centre des préoccupations d'un inspecteur des Eaux et Forêts en montagne : le reboisement et la restauration des pâturages. Sur le premier point, à la différence du discours souvent catastrophiste sur l'état du déboisement et les risques de dégradation des terrains (ravinements, crues torrentielles, etc.), il prend un position mesurée sur l'état de la forêt et, surtout, sur l'effort de reboisement nécessaire : « Le mal torrentiel dont souffre le Briançonnais et dû à un boisement insuffisant, y est donc fort ancien lui aussi; et il y a exagération à déclarer qu'il est de la dernière urgence d'y remédier. Mais il importe évidemment de ne pas trop attendre et de ne pas laisser s'aggraver telle dégradation qui, facilement corrigible aujourd'hui, le sera difficilement demain. Il faut reboiser pour réparer ou maintenir l'armature végétale du sol; il faut reboiser pour améliorer le régime des eaux, pour empêcher le ruissellement, pour augmenter le débit des rivières et entretenir la houille blanche. Le reboisement se présente donc dans ce pays, non comme une mesure urgente de salut public, mais comme une amélioration de premier ordre, une mise en valeur qu'un grand pays comme la France ne doit pas trop différer et que réclament l'intérêt général et l'intérêt local. » (pp. 190-191). A propos de l'économie pastorale, il se montre l'ardent partisan de la mise en place des fruitières et des associations d'éleveurs. Sur ce sujet, il se montre le fidèle continuateur de Félix Briot, qu'il cite souvent (sur la pensée de Félix Briot, cliquez-ici). C'est visiblement la pensée dominante de l'époque à propos de l'organisation pastorale dans les Alpes et peut-être plus généralement de l'organisation agricole en France. En regard, comme toujours lorsque ces fonctionnaires en parlent, il relève les réticences des habitants, voire leur mauvaise volonté manifeste. Pour remedier à cela, il préconise : « Il ne faudrait cependant pas négliger les moyens de persuasion et d'éducation : conférences, exemples, encouragements, par 1es agents forestiers, les professeurs d'agriculture, les groupements agricoles. [...] Il faudrait continuer à développer les fruitières et amener les montagnards à gérer celles-ci eux-mêmes ; on leur en démontrerait les avantages, et l'État pourrait subordonner, par exemple, à certaines conditions, le paiement des subventions qu'il accorde à ce sujet. Du reste, il faudrait convertir les montagnards à l'idée d'association et les convaincre des bienfaits du groupement et de la mutualité pour tous les objets de leur exploitation : bétail, cultures, engrais, pastorat, vente des produits, etc. » (p. 214).

Cette partie aborde aussi la question de la transhumance et des dégâts associés sur les pâturages d'altitude. Là-aussi, il prend une position mesurée, plutôt en faveur du maintien de la transhumance, contre les avis de ceux qui voudrait la bannir. En revanche, il préconise la diminution de l'élevage ovin par les habitants du Briançonnais, car c'est cet élevage qui détruit les pâturages inférieurs, alors que la transhumance ne concerne que les pâturages supérieurs où l'action du reboisement et de la restauration n'est pas nécessaire ni possible. Il souhaite lui substituer l'élevage bovin : « Il n'est donc nul besoin de supprimer ce mode d'exploitation, très naturel et assez profitable pour les communes montagneuses, qu'est la transhumance. Il leur apporte de précieuses ressources pécuniaires. C'est la transformation de l'oviculture indigène, la restitution à la forêt des pâturages inférieurs, qu'il faut poursuivre. » (p. 220)

Cinquième partie. Conclusions. (pp. 223-224)

Appendice (pp. 225-229) et Table des matières (pp. 231-232).

Extrait des Annales de la Science agronomique française et étrangère.

Il avait auparavant publié une étude plus ciblée sur le mélèze dans le Queyras : Notes sur les mélézaies du Briançonnais, parue dans la Revue des Eaux et Forêts, 1908, pp. 545-552 et pp. 577-592.

Les Briançonnais vus par Pierre Buffault

Quelques extraits sur l'image des Briançonnais (pp. 104-114, pour le texte complet, cliquez-ici)

Dans le chapitre : Hygiène. Maladies.

« ce qui caractérise le plus, malheureusement, ces populations du Haut-Dauphiné, c'est l'absence absolue d'hygiène et même de simple propreté, sauf de rarissimes exceptions.
L'usage de l'eau et des ablutions est totalement ignoré, bien entendu, mais, en outre, on vit dans la crasse et la saleté accumulées, ainsi qu'en témoignent les vêtements tachés et poussiéreux, les cols de chemise noirs de crasse, les enfants malpropres, les intérieurs de logis jamais nettoyés. »

« Dans beaucoup de villages, notamment en Vallouise, on couche l'hiver dans des draps en laine ou même dans des peaux de mouton plus ou moins mal mégissées. Ces peaux ne sont jamais nettoyées et servent à plusieurs générations; ces draps ne sont lavés qu'une fois par an, à Pâques; c'est assez dire dans quel état peu engageant et antihygiénique se trouve cette literie. »

« Les deux maladies qui sévissent dans le Haut-Dauphiné et en sont caractéristiques — bien qu'en décroissance cependant — sont le goitre et le crétinisme. [...] Il nous semble que les causes principales, primordiales de ces deux affections, sont le manque d'hygiène, l'insuffisance d'alimentation et les rapprochements consanguins multipliés que comportent les mœurs des populations briançonnaises les plus arriérées (Vallouise et Saint-Chaffrey), précisément celles qui présentent le plus de goitreux et de crétins. »

« Nous ne pouvons oublier l'impression éprouvée lors de notre premier passage dans certain village de la Vallouise : de petits hommes, que nous prîmes d'abord pour de jeunes garçons, nous saluaient avec un sourire hébété sur leur visage glabre, à peau ridée, parcheminée et jaune ; des femmes, assises au soleil devant leurs maisons, tricotaient, littéralement couvertes de mouches; plus loin, un idiot, bizarrement accoutré, somnolait, accroupi au soleil, sur le seuil d'une porte, couvert lui aussi de mouches innombrables; sur les balcons des maisons ou sur des cordes tendues séchaient des effets et surtout des draps de laine roussis par l'usage et lieu d'élection encore d'essaims de mouches avides; les portes des maisons laissaient entrevoir des écuries ou des logis sales et sombres; du fumier et des excréments d'animaux se voyaient partout auprès des maisons et dans la rue, et toute cette misère et cette malpropreté contrastait douloureusement avec le soleil éclatant et l'idéal azur du ciel. »

Dans le chapitre : Mentalité. Caractère.

« Ils sont généralement intelligents, aptes au commerce, adroits en affaires, méfiants, mais honnêtes.
Très économes et sobres, ils se contentent de très peu. Mais ils ne sont vraiment ni laborieux, ni ingénieux. Indolents en même temps que sobres, ils recherchent plutôt le moindre effort. Sous ce rapport, ils participent du tempérament méridional. »

« Très routiniers, ils ne tirent cependant pas tout le profit possible et rationnel des ressources de leur pays. Pourtant ils sont instruits et supérieurs sous ce rapport à bien d'autres régions de France. »

« Très attachés à leur pays [...], ils ont le caractère indépendant, l'amour de l'égalité et de l'équité, qualités chez eux héréditaires. Ils n'en sont pas moins respectueux de l'autorité et fort déférents avec les fonctionnaires. A ces derniers, ils promettent d'ailleurs aisément ce qu'on leur demande, mais sans l'intention ferme de tenir leur promesse. »

« La méfiance qui est dans le caractère de tout montagnard et de tout paysan dispose encore peu le Briançonnais aux associations corporatives. »

Dans le chapitre : Processivité. Criminalité.

« Les Briançonnais sont très peu processifs et procéduriers. On doit leur adresser des éloges à cet égard et les féliciter de leur esprit d'équité et de concorde.
Les justices de paix n'ont que des affaires peu nombreuses et insignifiantes et il en est à peu près de même du tribunal civil.
Les affaires correctionnelles ne sont non plus ni nombreuses ni graves, en général. Les vols sont fort rares. »

« En somme, c'est une population de braves et honnêtes gens. »

« Dans la Vallouise, les incendies, même les assassinats, ne sont pas rares et sont la manifestation d'inimitiés de village et de querelles de voisins. C'est une sorte de vendetta, de justice par soi-même. On met le feu chez celui-ci pour se venger de tel acte ou de telle parole, et il y a tel créancier qui se garde de réclamer son dû à ses débiteurs de peur de représailles farouches. Généralement, les auteurs de ces crimes restent inconnus, leurs concitoyens, par sympathie ou par peur, faisant autour d'eux la conspiration du silence. On prétend aussi que le vol et le viol sont commune en Vallouise. »

Pierre Buffault

Pierre Hippolyte Marie Joseph Buffault est né à Yzeure (Allier), le 5 novembre 1866, fils d'Edmé Buffault, inspecteur des Eaux et Forêts. Ancien élève de l'Ecole nationale des Eaux et Forêts, il a été inspecteur des Eaux et Forêts à Briançon, conservateur à Aurillac (1917), puis à Bordeaux (1928), où il a fini sa carrière. Il était officier de la Légion d'honneur. Il est mort le 11 février 1942, près de Bordeaux. Son frère Paul Buffault était aussi conservateur des Eaux et Forêts.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages concernant son domaine d'activité, ainsi que de nombreux articles. Il a aussi écrit un livre sur l'histoire de sa famille :
Une famille de bourgeois, marchands de Paris. Les Buffault.
Bordeaux, Impr. R. Taillebourg fils, 1923, in-8°, 87 p.

Références  (Voir : Liste des sources et références)

Sur Pierre Buffault :
Dossier de la Légion d'honneur : cliquez-ici.
Généalogie sur Geneanet : cliquez-ici (avec une erreur sur le lieu de naissance).
BNF

Guillemin : 1573
BNF : 8-S-14573